Forts d’avoir en notre possession une voiture et déterminés à en rentabiliser la location, nous décidons de compléter notre week-end Parque National par une visite au lodge de Pico Bonito. Le Lodge est en fait un Eco-hôtel chic et reconnu dans la région. Dans nos recherches pour percer le mystère du parc, nous les avions appelé mais ils offraient, évidemment, une solution chic, sans tracas et à fort prix. Cependant, le Lodge compte dans ses attraits une ferme de papillons et un serpentorium qui, de prime abord, sont dignes d’une visite. Le lodge est situé de l’autre côté de La Ceiba et nous nous y dirigeons dans un approximation qui n’a d’égal que la connaissance de celle-ci…
Chemin faisant, on percute un autre trou qui orne la chaussée et malgré les jurons du chauffeur, on poursuit notre route comme si de rien n’était. Nous savons que la route qui mène au Lodge est située aux alentours du village de El Pino mais comme il est souvent difficile d’identifier avec certitude les villages que nous traversons, nous passons tout droit à celui-ci, non sans en remarquer un restaurant de bord de route duquel s’échappent des effluves de feu de bois et viandes grillées. En demandant notre route à un bien attentionné camioneur, il nous renvoie tout près de La Ceiba. Dubitatifs mais coopérants et voulant laisser toute sa crédibilité à ce gentil quidam, on rebrousse chemin.
Au moment de repartir, on constate que le cahot rencontré plus tôt nous a laissé plus que des injures : la roue avant gauche de la voiture affiche une jolie crevaison! Il nous faut donc arrêter dans un garage de bord de route qui, ici, sont légion.
Un petit toit en tôle qui abrite un énorme compresseur à air avec deux jeunes hommes (ils ont l’air d’avoir 12 et 16 ans) qui triment dur sur des pneus et des jantes. Le plus jeune des deux enlève la roue défectueuse, frappe la jante avec beaucoup d’amour, et accessoirement avec un marteau rudimentaire, puis regonfle le pneu et repose la roue seulement pour réaliser que le tout fuit encore.
Il recommence donc, mais cette fois il fausse le filet d’une des tiges fileté et la bousille définitivement : Bravo buddy! Un peu piteux, il nous explique que la roue fuit encore et nous exhorte à poser le pneu de secours. En sortant le pneu accidenté de la veille, les épaules lui tombent et son regard en dit long sur ce qu’il pense des aptitudes de chauffeur de son interlocuteur : le momentum vient de changer!
Il recommence son manège sur la deuxième roue et au moment de frapper la jante, l’autre mécanicien de fortune l’interrompt et fait le travail à sa place. Ses coups semblent mieux placés et on sent une certaine assurance dans son geste, ce qui faisait cruellement défaut au premier luron. Au test de l’air, la réparation tient le coup et, sans éclater de rire, quand ils nous ont demandé 40 lempiras (2 $), notre frustration est disparue. Nous avons repris la route sur quatre pneus, mais toujours sans roue de secours, bien décidés à faire mentir le dicton du jamais deux sans trois.
Fatigués de chercher, on arrête à la porte d’une base militaire pour demander, à nouveau, des directions. Marie-Claude a mobilisé, à elle seule, la quasi-totalité des effectifs de l’armée déployés dans ce poste. De l’auto, après deux minutes, on ne la voyait plus, tellement il y avait des gars en treillis militaire autour de sa jupe… Si on est capable de comprendre l’attirance naturelle de ces soldats, on comprend moins bien pourquoi aucun d’eux ne connaissait l’endroit que nous recherchions; ils sont peut-être forts en tactiques, mais pour l’orientation, on repassera...
Coup de téléphone au lodge pour se faire expliquer la route à suivre : « Passé le Rio Coloradito (qui s’est avéré être le Rio Corintho, on mettra la faute sur le cellulaire), entre les deuxièmes et troisièmes boyas, se trouve, sur la gauche, un lampadaire peinturé en jaune à côté d’une pulperia : c’est là! » «Et le nom de la pulperia senior? » «No save ». Bien oui, rien que ça! Un lodge de supposée renommée mondiale sans enseigne… c’est beau l’éco-tourisme mais c’est pas facile à trouver!
Nouveau changement de direction et nouveau retour sur nos pas! Entre les deuxièmes et troisièmes boyas (sorte de speed bump locaux) il y avait effectivement un poteau peinturé en jaune qui se trouve tout juste à côté d’une puperia (« Alexandra, senior, es su nombre! ») mais surtout devant un restaurant ouvert aux quatre vents, avec un grand divan et duquel s’échappe des effluves de viandes grillées… Ah! Que c’est beau la découverte…
Une route en grosses pierres nous a menée, sur quelques kilomètres, à l’endroit que nous cherchions depuis maintenant trop longtemps. Une chance que la crevaison était réparée! Nous sommes arrivés à 13h40 en ce beau dimanche et l’affiche accrochée à la clôture cadenassée indiquait clairement la fermeture du site à 13h30 le dimanche… Comme le ridicule ne tue pas, on a éclaté de rire! Bien oui, c’est sûr! Qu’importe, on sort quand même de l’auto pour au moins pouvoir dire qu’on a touché à la clôture de la place. Après quelques minutes d’errance et de prise de conscience de la risibilité de la situation dans laquelle nous étions, un garde arrive pour nous expliquer ce que nous avons déjà constaté. Forte de son expérience militaire, Marie-Claude se lance en supplications mielleuses et réussit à convaincre le garde d’essayer de nous avoir une visite. Quelques minutes plus tard, on gentil guide moustachu vient nous ouvrir la barrière et c’est en chantonnant familialement le « tu étais vraiment beau, avec ta moustaaa-aaache… » des Trois Accords que nous marchons dans la jungle.
La visite de la volière de papillons ne valait pas le prix d’entrée (même pas vu de Morpho) et bien que le serpentorium était bien peuplé (une quinzaine de serpents), ces animaux restent peu attirants, pour rester polis. Ça se place bien dans une conversation qu’on a vu un Terciopelo (fer-de-lance), un Boa constrictor et des serpents à sonnettes, mais dans le fond, on étaient surtout contents de voir les cadenas sur les cages… Notre guide, qui parlait anglais, était bien intentionné, mais la description de cette visite fait moins de sept lignes et ça démontre toute la l’attention qu’elle a suscitée en nous.
En retournant, pour une énième fois, vers La Ceiba, on passe faire quelques courses dans une grande épicerie et on se pointe, comme de parfaits innocents, chez notre locateur de voitures. On y est reçu tout sourire, cette fois c’est Romane et Colin qui usent de leurs charmes, et personne ne remarque que nous ramenons la voiture pas mal plus endommagée qu’il y a 48 heures. Ces gens ont même la gentillesse de nous reconduire chez nous; on se sent presque mal… et on espère secrètement qu’ils vont frappé le même trou qu’on a rencontré la veille!
Entre deux séances de piscine, on a fait dégeler un Robela, brochet de mer, entier qui nous restait du marché. Sa cuisson en papillote et le festin que nous nous en sommes fait a jeté un petit baume sur notre journée somme toute un peu moyenne : visite ordinaire, route un brin stressante, mais le tout parsemé d’anecdotes très drôles et combien de lempiras sauvés en réparation de la «coche»! On a conclu le tout en regardant les étoiles dans le hamac sur notre balcon : certaines journées moyennes finissent mieux que d’autres…
Comme c'est chouette de vous retrouver -- et en super forme, à part ça!
RépondreSupprimerBisous à la smala! On pense à vous ... xoxoxoxoxoxo