Levés de
bon matin grâce à notre réveil familial (Colin!), on s’est retrouvés sur le
bord de la grande route à 8h pour prendre l’autobus vers La Ceiba. Nous
entreprenons notre grande aventure Utila en laissant derrière nous une piscine
verte dont le moteur, brisé depuis deux jours, est en réparation. Notre trajet
en autobus est assez drôle puisque l’autobus est bondé et que nous sommes
chargés de nos sacs de voyage. On débarque au premier arrêt de La Ceiba et on
s’engouffre dans un taxi pour aller au port. C’est à ce moment que nous avons
compris les mises en garde alarmistes concernant le Honduras.
Pour la
première fois de notre séjour, on expérimente la crainte de ne pas voir l’heure
suivante… Le chauffeur de taxi roule avec le couteau entre les dents. Même
Marie-Claude qui est réputée être une conductrice téméraire hésite entre
s’agripper et frapper le chauffeur dément pour prendre sa place. Pourtant, on
est en avance sur l’horaire, il est 8h15 et il faut être au port pour 8h30 soit
une heure avant le départ du traversier, et la route n’est pas plus achalandée
que d’habitude. Après des dépassements d’un ridicule consommé et plusieurs
sueurs froides, on atterrit au port dans une cohue monumentale : un bateau
vient d’arriver et un autre part dans une heure… Une mer de passagers, des
valises, des bagages, du fret et des dizaines de taxis qui klaxonnnent et qui
resquillent fermes.
On réussit
à se frayer un chemin jusqu’au guichet du Utila Princess II pour y faire la
file. Quand notre tour est arrivé, le guichetier nous a demandé nos passeports!
Ben oui, les p-a-s-s-e-p-o-r-t-s. LE mot qui nous fait maintenant frémir. On
avait pris les nôtres au cas ou, Prcequ’ils sont souvent nécessaires quand on paie avec la carte de crédit, mais
ceux des enfants étaient restés à la maison… Décidément, nous et les passeports
des enfants! Après quelques échanges et plusieurs supplications, le gars finit
par nous émettre nos billets et on peut enfin lever les yeux et commencer à
penser au voyage… La demi-heure de jeu avant le départ du traversier nous a
servi de tampon pour recouvrer un peu nos esprits.
L’Utila
Princess II est un catamaran ponté avec un toit rigide. Les coques reçoivent
les bagages avant que les bancs de la cabine accueillent les voyageurs. On
prend place, tous les six, sur un banc vide et bien placé malgré le fait que
nous soyons les avant-derniers à embarquer. On a vite compris que les airs
climatisés situés juste au-dessus de notre banc dégoutent! Environ 3 minutes
après le départ, on quitte la baie du port et le bateau commence à taper
fortement dans les vagues.
On s’amuse un peu de la quantité de gens qui doivent
se lever et aller prendre l’air à l’arrière du bateau et des vas et vient des
membres d’équipage qui distribuent les sacs à vomis et des essuie-tout jusqu’au
moment où on se rend compte qu’on est nous même susceptibles d’être malade.
L’heure de la traversée a été plutôt longue et certains d’entre nous on dû se
concentrer fort pour ne pas revoir leur déjeuner, mais, au final, seul notre
colin-matin aura utilisé son sac avant de sombrer dans un tendre sommeil.
En
débarquant du bateau on est assailli de vendeurs et de resquilleurs qui veulent
nous offrir qui des randonnées, qui des fruits, qui un endroit où dormir. Comme
nous sommes des gens préparés mais que nous aimons l’aventure, on a fait, hier,
deux réservations provisoires dans des hôtels. L’île d’Utila quoiqu’assez
vaste, n’est occupée que dans une très faible part. En fait, tout se résume à une rue d’environ
deux kilomètres, d’orientation est-ouest, dont le centre donne tout juste sur
le quai municipal. Il s’agit là de la seule, ou à-peu-près, intersection de
l’île. Face au quai commence donc une rue qui rentre dans l’île et c’est par là
que nous marchons pour découvrir le premier hôtel, le réputé Mango Inn. Sur
place, on constate qu’ils nous ont réservé, vu notre grande famille, une
maisonnette à 210 U$ la nuit. On décide donc de tenter notre chance vers notre
second objectif, le Marguarita, situé du côté ouest de l’île. En s’y rendant,
on trouve peu de vie et un manque d’ambiance qui est presque inquiétant.
LA rue
d’Utila longe la mer et le Marguarita est situé du « mauvais » côté
de la rue… On a donc pas versé de larmes
quand ils nous ont dit ne pas avoir reçu nos courriels. Un peu débinés, on a
repris la rue vers le centre-ville et nous avons décidé de nous arrêter manger
parce que la marche sous le soleil de midi et l’incertitude commence à nous
miner un peu. En se faisant un festin de baleadas, de pasteles et d’Imperial,
on téléphone à un hôtel dont Marie-Claude avait pris un feuillet en débarquant
du bateau. Une fois restaurés et rafraîchis, on traverse l’île et, en arrivant
au seul coin de rue, on découvre l’autre côté de l’île. Commerces, restaurants,
dive shops, épiceries, vie et ambiance nous accueillent dans une étreinte tant
attendue.
L’hôtel Trudy’s, situé presqu’à l’extrémité est de l’île, est lui, du
« bon » côté de la rue et est constitué de deux grands bâtiments qui
encadrent un grand espace de sable qui donne sur la mer. Terrain de volleyball,
hamacs, bar, table de pool, ,espaces au soleil et places à l’ombre sont bordés
par des grandes galeries de bois qui abritent les chambres. Un quai avec des
balançoires complète le tout. En entrant là, on savait que c’était l’endroit
idéal pour nous. On a déposé nos sacs et on est repartis tout de suite,
contents de s’être trouvé un nouveau chez nous et en essuyant les plaintes des
enfants qui voulaient juste profiter de tout ce qu’ils venaient de voir.
Notre
première activité insulaire a été une visite dans une ferme de protection d’une
espèce d’iguanes endémique à l’île d’Utila. Une longue marche à l’intérieur des
terres nous a conduits dans cet endroit charmant tenu par des gens forts sympathiques.
On a eu droit à une guide française venue faire du bénévolat pour sauver des
bestioles en voie de disparition dans une île paradisiaque. Darwin avait un peu
raison en disant que l’évolution forme des jeunes gens mieux équipés… et plus
imaginatifs!
Outre les iguanes, bien sympathiques, mais un peu communs, on a vu
un Boa constrictor géant. Géant comme dans le corps de la taille d’un mollet
d’adulte! Il avait été apporté là par un fermier tanné de se faire manger ses…
poulets! Oui, oui, un poulet entier; pas un quart de poitrine avec salade de
choux à côté! Un poulet avec les plumes, les pattes et tout. Énorme! On est
reparti vers notre hôtel en regardant par terre devant nous et même en se
retournant de temps à autre…
Pour
digérer tout ça, on est allé à la plage à l’extrémité est de l’île, jouer dans la
mer (sans serpents) et profiter du coucher de soleil. Comme on a manqué de
bière en même temps que la noirceur arrivait, on a été forcés de rentrer se
laver avant d’aller souper. On a arrêté notre choix sur une institution locale :
le Babalu. « Dock bar », bar construit sur un quai, fait de planches
de bois ajourées, l’endroit est d’un relax total et absolu. Toutes les tables
sont peintes d’un échiquier sur lequel des bouchons de différentes couleurs
constituent les pions d’autant de jeux de dames.
Dans des airs de blues feutré,
on retrouve, au centre de l’endroit, un grand trou éclairé d’environ 10 pieds
par 10 pieds, sans garde-corps (on n’est pas au Québec!), qui est aménagé de
coraux au travers desquels se promènent une myriade de poissons : un
aquarium en forme de hublot sur la mer, ça n’a pas de prix! Rien à voir avec
l’aquarium en plastique de chez Maylan!
On a mangé
des produits locaux tous issus de la mer et on est retourné vers nos quartiers
en appréciant l’ambiance festive de cette chaude nuit. La rue est étroite et il
n’y a que très peu de voitures sur l’île (moins de 20). Les gens circulent donc
majoritairement à pied ou en vélo, mais il y a tout de même une quantité
effarante de scooters, motos, quatre roues et carts de golf qui n’ont pas tous
le même sens du civisme et du respect de l’environnement sonore! Nous nous sommes vautrés dans nos lits pour
assimiler, un peu, une journée si riche en découvertes et textures. Colin nous
a dit que quand il serait un adulte, il reviendrait ici!
Après un
gros déjeuner aux pancakes bien américaines on s’est dégoté un tour de bateau
pour se rendre sur une île vraiment déserte à l’extrémité sud-ouest d’Utila. Water
Cay est donc un îlot parmi une petite série qui forment des keys. Capitaine Hal
nous a déposés vers 11h30 en nous promettant de revenir nous chercher à 15h.
Une fois que le bruit de son bateau se fut estompé dans le lointain, nous
étions seuls sur l’île avec Vendredi, le racleur de feuilles mortes et
collecteur de droit d’accès, 50 lempiras (2,50$) par personne. On s’est
installé sur un bras de sable blanc qui plonge dans la mer turquoise et on a
pris du soleil et fait de la plongée en apnée dans les coraux avoisinants.
Les
poissons aux couleurs exotiques valsant dans le corail mauve étaient tout
simplement sublimes. Jules et Marine étaient vraiment émerveillés et en guise
de remerciement ils nous on même permis d’aller plonger en amoureux. Ben oui,
on a laissé nos 4 enfants tout seuls sur une île déserte pendant 20 minutes!
Ils seraient d’excellents candidats pour le prochain tournage de LOST. Même
sans dîner digne de ce nom, un simple paquet de biscuits acheté à la sauvette
avant de quitter, les enfants ont adoré et sont restés surpris de voir le
bateau revenir nous chercher si tôt.
On a
terminé la journée sur le quai de l’hôtel en sirotant un rafraîchissement
devant le coucher de soleil et en regardant les enfants se baigner dans la mer
et se balancer comme s’ils n’avaient jamais vu de balançoires avant. Nous avons
eu un autre excellent souper sur une terrasse parmi l’effervescence du samedi
soir. Tout le monde avait sorti son grill dans la rue et l’ambiance était
joyeuse et agréable.
Utila ne
comporte qu’une seule petite colline, Pumpkin hill, du haut de laquelle le
point de vue est, semble-t-il, magnifique. Pour notre deuxième matin, nous
sommes allés déjeuner au Mango Inn, ceux qui nous avaient gardé une maisonnette
à 210 $ la nuit. Marie-Claude a alors réalisé que c’est là qu’elle avait séjourné
quinze ans plus tôt; c’était alors une auberge de jeunesse à 5$ la nuit…
L’inflation ne frappe pas partout également!!!
Nous sommes
ensuite partis user nos gougounes et digérer notre pain doré en marchant vers
Pumpkin hill et les Water Caves dans lesquelles on peut, semble-t-il, se
baigner. Ne trouvant aucune indication pour nous guider, on a marché droit
devant nous pendant plus d’une heure pour aboutir sur la plage du côté nord de
l’île. Vision désolante : en raison de l’orientation de l’île, la plage
est couverte de déchets de plastique. Nous avons emprunté un sentier longeant
la mer et taillé à même les déchets et les coraux.
Cette longue et hasardeuse balade dans
un terrain accidenté et inhospitalier nous a menés, bien plus loin, à une toute
petite plage près de laquelle étaient installées deux familles; on y a fait une
pause bien méritée après tant de marche sous un soleil accablant. Nous
avions mal calculé la quantité d’eau pour subvenir aux besoins de tout ce beau
monde, mais en revanche on s’est cueilli une pipa en chemin pour compenser étancher
nos soifs. En repartant,
forts des informations recueillies auprès des gens présents nous avons trouvé
un sentier puis une route qui ont fait en sorte que l’heure et demie de marche
du retour était plus rassurante que l’heure et demie à l’aller.
Nous avons regagné
la route principale (celle de l’aéroport) tout juste à la hauteur d’une écurie
qui offre des randonnées. Bredouilles de n’avoir trouvé ni Pumpkin hill, ni les
cavernes souterraines, et n’ayant pas le courage de revenir à pied le
lendemain, on est donc arrêté et on a pris rendez-vous question de visiter ces
deux sites d’intérêts à cheval. Tristes de
ne pas avoir trouvé, par nous-mêmes, le sentier qui nous aurait permis de voir
Utila de haut, on est allés noyer notre peine au El Picante, un restaurant
mexicain avec une grande terrasse à l’étage donnant sur la mer. On y a vu un
poisson énorme (un Torpon), près de quatre pieds de long, qui se baladait
doucement autour des quais mais on a surtout pris l’apéro des
randonneurs : margarita et Pina colada!
À dix heures
le lendemain, Sterling et Oscar, du ranch, sont venus nous chercher à l’hôtel
avec un quatre roues à deux banquettes doubles et une boîte derrière. Les
enfants ont été ravis d’enfin pouvoir se balader comme les locaux, dans une
grosse machine qui fait du bruit. Une fois au ranch on a rencontré Thunder, Spirit
et Kit nos montures pour l’occasion. Jules et Marine ont pris place sur Kit, attaché
par une corde, qui suivait Oscar, notre guide. Marie-Claude et Romane ont
enfourché Spirit alors que les deux CO ont rebaptisé Thunder en Tonerre pour la
journée.
La randonnée fut fantastique et les enfants sont un peu tombés en
amour avec l’équitation. Oscar nous a montré les différentes essences d’arbres
qui bordaient le sentier et on a même eu droit, malgré le mot d’ordre du
propriétaire du ranch, à la montée de Pumpkin hill à cheval : toute une
première pour les quatre têtes blondes. C’était franchement escarpé !
La vue du
sommet était effectivement spectaculaire, et le sentiment de dominer l’île,
bombardée par les rayons du soleil de midi, fut délectable. Un paysage à 3600
qui n’a de fin que dans l’horizon de la mer : époustouflant! La descente
ne nous laissa pas en reste d’émotions fortes et on a tout juste eu le temps de
reprendre notre souffle avant d’arriver à l’entrée d’une grotte.
Oscar est
entré le premier et a disposé une douzaine de chandelles dans ce labyrinthe de
stalactites souterraines. On s’est tous baignés dans un bassin d’eau sulfureuse
dont la fraîcheur nous a agréablement refroidis. On a partagé ce moment magique
tous ensemble en prenant bien conscience des extrémités que nous découvrions
consécutivement : du sommet de la colline jusqu’au sous-sol de l’île; incroyable
quand même! On a terminé notre randonnée ravis de tant d’émotions et de
découvertes et Sterling est venu nous reconduire à notre hôtel juste à temps
pour attraper le bateau de l’école de plongée qui quittait; décidément, une
activité n’attend pas l’autre.
Installés à
l’avant du bateau, on a regardé la douzaine de plongeurs se préparer pour leurs
plongées respectives pendant les quelques minutes que le trajet a pris. Une
fois sur place, on les a laissés quitter le navire et on est nous-mêmes sautés dans
l’eau pour faire de l’apnée. Marie-Claude et Jules ont ouvert le bal, suivis de
Charle et Marine, qu’on a du forcer à aller voir autant de beautés
sous-marines, et même Colin et Romane se sont payé une visite des coraux.
Romane était presque en transe devant tant de poissons mauves! Le site était
ravissant, l’eau d’une clarté exceptionnelle et les coraux et les poissons nous
ont offert un spectacle presque irréel. Une tortue faisait dodo dans l’eau non
loin d’un barracuda énorme, les plongeurs valsaient autour de nous et sur la paroi
d’une falaise de corail, l’enchantement même!
On est tous rentrés au quai,
songeurs devant tant de splendeurs et les parents ont même du devancer l’heure
de l’apéro pour se permettre de retrouver leurs esprits pendant que les enfants
se balançaient tout en sautant dans la mer dans une ronde interminable. Une
fois que le soleil eu embrassé la mer, nous sommes sortis manger dans une autre
nuit chaude et pleine d’ambiance d’Utila. Comme chaque soir, les parents se
sont laissé bercer par la brise chaude et le cliquetis des vagues qui frappent
doucement le quai pour admirer les étoiles qui scintillaient dans la mer. Un moment
tout aussi inspirant que les magnifiques couchers de soleil.
Pour notre
dernier matin, on a bien pris le temps d’apprécier les joies du quai qui nous a
si bien accueillis depuis les derniers jours avant d’aller prendre un autre
grand déjeuner au resto. Puis, dans une ambiance empreinte d’une palpable
mélancolie, on est allé s’échouer sur la plage à l’extrémité ouest de l’île.
Avant de se rendre au traversier, on s’est fait un petit pique-nique improvisé
avec des baleadas et des pasteles et on a du se rendre à l’évidence, 14h
sonnait pour nous la fin de notre aventure Utila…
Tout le
monde vous le dira sur l’île, le plus grand mensonge qui y circule se traduit
librement par « oui, oui, on repart demain! ». Nous étions venus pour
une ou deux nuits, on sera resté quatre nuits et cinq jours. Il y a un
magnétisme certain dans cet endroit. Très peu de choses ressemblent à ce qu’on
retrouve sur le continent. On se sent ici chez soi très rapidement, et l’envie
de rester coller dans cette ambiance douce, calme et festive est très difficile
à combattre. Qui plus est, nous avons découvert que nos enfants avaient, autant
que nous, l’appétit de la découverte et de l’inconnu; c’est probablement ce qui
restera de plus marquant de cette expédition. L’équitation et la plongée en
apnée les ont beaucoup marqués; Jules nous a suppliés tout l’avant-midi de
rester plus longtemps. Il reviendra peut-être y faire ses cours de plongée
sous-marine quand il sera grand puisque son intérêt pour cette activité semble
indéniable. Il pose mille questions et a vraiment été conquis par le centre de
plongée intégré à notre hôtel. Il a tout enquêté; du remplissage des bonbonnes
aux exercices des plongeurs en bordure du quai.
Le retour à notre routine
caribéenne, en elle-même exceptionnelle, signifie quand même moins d’émotions
nouvelles et d’aventures inoubliables. Ce voyage dans notre grand voyage
restera comme une étape autant imprévue que riche. C’est avec regrets et,
peut-être, quelques larmes que nous avons repris le traversier. Les plus
tristes ont fait la sieste pour oublier un peu la réalité du départ et pour
mieux ancrer tant de merveilleux souvenirs insulaires dans leurs mémoires de jeunes
voyageurs.