mercredi 29 février 2012


Jour 37 (vendredi 24 février) 

Nouvelle technique photographique pour croquer une image sans éveiller de soupçons: prendre un enfant (le sien ou un autre) et feindre de le photographier comme sujet principal (évidemment on fait un compromis sur le focus). Ici le sujet principal est en fait la carabine déposée comme un casque de moto sur une table de restaurent. Ben oui, tout le monde à le droit de luncher à son aise ! Trop Honduras !

Un autre vendredi que nous entreprenons lentement. C’est pas toujours facile de revenir de vacances… Après le dîner on prend l’autobus vers La Ceiba pour aller faire quelques courses et louer une voiture en vue de notre expédition du weekend dans la Réserve de Cuero y Salado.
L’autobus est bondé et il nous est ainsi permis d’être témoin d’une scène typique. Une famille constituée d’une maman, une grand-maman, trois jeunes enfants et un jeune homme presqu’adulte occupent plusieurs bancs avec des bacs de plastique remplis d’épis de maïs cuits. Près de La Ceiba, ils débarquent à des arrêts différents, par petits groupes, le jeune homme seul d’abord, la maman et un petit ensuite et finalement la grand-maman avec les deux derniers, pour vendre leurs maïs en ville. Le plus vieux des jeunes enfants qui doit avoir 6 ou 7 ans, refuse d’y aller et les deux matrones lui tombe dessus… Au moment de débarquer avec sa grand-mère, quelques minutes pus tard, il pleure et s’agrippe à l’autobus comme si sa vie en dépendait. La vente de maïs ne semblait pas dans les plans de sa journée… C’était vraiment triste, mais ça nous a permis d’expliquer et de démontrer par l’exemple à nos enfants que leur vie à eux n’est peut-être pas aussi pire que ce qu’ils peuvent en penser certains jours…
Pour solutionner nos problèmes à nous, on s’est ensuite dirigé du côté de chez Claro parce que notre clé internet ne fonctionne plus depuis notre retour de Cayos. Le gentil Eduardo nous configure un de nos ordinateurs en nous expliquant qu’il ne comprend pas pourquoi on était capable de se connecter avec notre ancienne configuration. La seule réponse possible : I.H.! C’est bizarre, mais les enfants étaient vraiment très sages après la morale de l’autobus… Tellement sages qu’on s’est tous payé un cornet de crème glacée.

Armés de nos cornets sucrés (On ne trouve pas de cornet régulier ici!) à la pistache, à la fraise et autres saveurs typiques, on s’est mis à chercher les bureaux de la Fundation Cuero y Salado (Oui, oui, l’acronyme reconnu est : FUCSA!) qui gère la Réserve que nous visiterons demain. On ne se fait pas trop d’illusions, parce que nos dernières recherches, pour la Fondation du Parque Nationale Pico Bonito, s’étaient avérées vaines et on a bien peur de devoir dire « fuck ça » au terme de celles-ci aussi... Alors qu’on avait l’air complètement perdus au milieu d’un coin de rue, un gentil garagiste nous a orientés vers le bureau recherché et on a pu établir, avec les gens de la fondation, une stratégie efficace pour visiter la Réserve. Fantastique!

Tous heureux d’une telle réussite, on se donne un nouveau défi : trouver le Musée des papillons. Une grosse heure de marche à déambuler dans un quartier qu’on ne connaissait pas nous a amenés devant la porte dudit Musée uniquement pour constater qu’il était fermé depuis quinze minutes… Au moins on sait où il est et on pourra toujours le visiter à un autre moment. On se dirige ensuite vers une nouvelle entreprise de location d’auto parce qu’on est un peu gêné de retourner chez Econo de peur qu’ils se soient rendu compte des dommages que notre dernière location a laissés sur leur voiture. Malheureusement, ce nouveau locataire n’a rien pour accommoder nos besoins et on est donc obligés de retourner chez Econo. 

On est accueilli avec des grands sourires et ils nous offrent la même voiture que la semaine dernière… On fait croire qu’on préférerait en essayer une nouvelle, comme la Suzuki Celerio qui traîne au fond de la cour, d’autant plus qu’elle est moins cher. Lors de la vérification présignature du contrat, Charles regarde la roue de secours et découvre qu’il manque un gros morceau de métal à l’intérieur de la jante. De plus, une des roues avant n’est retenue que par trois boulons malgré les quatre tiges filetées qu’on y retrouve. Le patron nous explique donc candidement que certains clients abiment les voitures et qu’il se retrouve avec des situations comme celle-là! On fait le grand numéro des gens surpris et, on le fait tellement bien qu’un employé décide de remplacer la roue de secours de la Suzuki par celle de la voiture que nous avion la semaine dernière et que nous savons (et avons) démolie… Contrairement à Mario Kart on aura donc seulement une chance de réussir notre périple!

mardi 28 février 2012

Rancho San Luis


Jour 36 (jeudi 23 février) 

Surement parce qu’on a pris le temps de se remettre physiquement et mentalement de notre expérience à Cayos, on s’est levé tard et sans aucun remords. On en était à préparer le café quand MINS s’est pointé pour offrir un lift en ville. On lui a proposé un jus de carambole maison fait à partir des fruits qu’on récolte sur les terrains de Mango Tree. On a bien ri de lui quand il nous a avoué n’en avoir jamais goûté. C’est très drôle de faire découvrir un produit local à… un local!
 On a décliné l’offre de Tony parce que le contact avec la grosse civilisation au lendemain de notre retour de l’éden nous semblait inapproprié. Après la baignade matinale et l’école, Marine et Marie-Claude sont allées chercher des tortillas chez Pollos Nicolle. Pour tout dire, elles sont nettement moins bonnes que celles qu’Alejandra nous a faites à Cayos.
Pour se changer les idées, quoi de mieux que d’aller voir des animaux au zoo local. 


Tout le monde dans l’autobus jaune et hop! direction Rancho San Luis. Les tarifs sont encore moins chers en sens contraire de La Ceiba: 20 lempiras pour 20 kilomètres d’autobus pour 6 personnes!
Le Rancho San Luis est en fait une ferme privée aménagée de cages, d’étangs et d’enclos qui abritent des animaux « sauvés et recueillis (…) ». Un charmant petit sentier nous fait faire le tour et on peut voir un troupeau de cerfs, différentes espèces d’oiseaux sauvages et domestiques, des petits mammifères, des vaches et des chevaux. 
Le clou de la visite est constitué d’un couple de singes-araignées vivant en liberté sur une île au milieu d’un marais vert, et d’une famille, papa, maman et fiston, de singes capucins. On a pris autant de temps pour observer chaque type de singe qu’on en avait pris pour faire le tour du reste de la place. Les capucins et Colin se sont rapidement liés d’amitié et le papa singe et lui ont même fini par jouer à se lancer un bâton. Le manège a arrêté quand la patte du singe, dans le jeu, a effleuré la main de notre petit frisé blond. On a toujours dit que Colin était notre petit animal de compagnie…

En sortant, on a attendu l’autobus une bonne demi-heure et on a été très soulagé d’en voir un arriver avant que le soleil ne se couche. Le reste de la soirée fut sans histoire sauf pour Colin qui garde un souvenir impérissable de son moment partagé avec Papa-capucin : « sa main était molle à l’intérieur! ».

Cayos Cochinos - WOW !!! C'est beau finalement le turquoise !

Jour 34 et 35 (mardi 21 et mercredi 22 février) 

Le numéro 81: Tony, notre MINS national !
 La sonnerie du cadran a fait plutôt mal à 5h30! « No pain no gain » comme disait l’autre, et Charles s’est levé pour préparer la glacière et charger l’auto de Tony qui n’a même pas daigné se lever avant 6h15… Pas fiable! Colin l’a même battu au saut du lit!!! On essaie de se faire un petit déjeuner normal, mais c’est bien difficile en vertu de l’heure qu’il est et du petit stress prédépart qui nous envahit tous. Le ciel est rempli de gros nuages gris qui sapent un peu notre enthousiasme : c’est bien les Le numéro 82îles désertes, mais qu’est-ce qu’on y fait quand il pleut?
 À 7h le téléphone sonne et MINS nous annonce que le vent est fort sur la mer et que son pilote (lui ne navigue pas) ne s’est pas encore pointé le bout du nez. On commence à déchanter et même si on en profite pour passer l’aspirateur dans la piscine, il nous est difficile de cacher nos appréhensions qui grandissent presqu’autant que les nuages gris au-dessus de nos têtes. Puis, à 8h Tony nous rappelle pour nous dire de descendre, que tout est rentré dans l’ordre. En quittant la maison, on constate qu’il pleut et que cette aventure ne commence vraiment pas comme nous l’avions imaginée.
Une fois rendu sur la plage, le soleil arrive en même temps que l’équipage. Nos craintes se dissipent  et on rigole en laissant passer un troupeau de vaches entre nous et le bateau! C’est quoi l’indice de crème solaire recommandé pour les bovidés? Si on les enduit de Tropicana-coco, est-ce qu’elles peuvent produire du lait de coco? On abandonne ces grandes questions pour prendre place dans le bateau et se diriger vers le Palma Real où Tony doit récupérer quatre clients qu’il amène en plongée sous-marine aujourd’hui.
 Les vagues sont fortes et les embruns nous trempent en moins de deux minutes mais comme le soleil luit toujours, on garde le sourire et on apprécie le beau tour de bateau. Rapidement, la mer passe du brun, près de la côte, au vert, plus au large, à notre grand étonnement. Puis, plus on se rapproche des premières îles de l’archipel de Cayos Cochinos, plus l’eau devient bleu, puis bleu clair pour finalement être d’un turquoise resplendissant! Les îles sont nombreuses et la plupart sont toutes petites avec des toits de chaume ou uniquement des palmiers. Un paysage idyllique s’offre à nous et il est même un peu difficile de croire qu’on va passer 24 heures ici. On fait un premier arrêt pour remplir un document pour nous identifier en tant que résidents temporaires : la bureaucratie est vraiment installée partout, même dans les endroits protégés!
 Puis, quelques minutes plus tard, le bateau nous laisse sur une ravissante petite île, Cachaguate 2, sur laquelle nous rencontrons Cartagena et Alejandra. Lui est un sexagénaire svelte et véloce malgré des extrémités qui ont visiblement enduré des maux qui ont laissé des traces troublantes. Elle est une bonne maman accueillante avec un œil brillant devant nos quatre têtes blondes qui sont jugées, une fois de plus et sans appel, « muy bonito y que lindo! ». Nous qui pensions aboutir dans un petit village, on se rend compte qu’on a loué l’île au complet! Nous serons donc notre famille et nos hôtes : Wow! On espère presque trouver une pancarte « à vendre »! 

L’île, minuscule, est parsemée de petits bâtiments en bois : 2 cabines, une cabane abandonnée et une toilette ceinturent une grande maison. Au grand dam de Tony, nous choisissons la cabine la plus éloignée de la maison, qui est aussi la plus éloignée. Il reconnaît quand même être un peu trop craintif et ne comprend pas que des volets rustiques qui ouvrent sur une mer turquoise amènent une touche de magie que nos esprits de citadins ne sauraient laisser passer.
Notre Cabine !
 Puisqu’on a peu de choses et qu’on est ici pour une nuit seulement, on ne prend même pas la peine de s’installer et on sort masques, palmes et tubas pour se lancer dans cette somptueuse mer turquoise. Après une séance de plongée en apnée, on décide de traverser un petit bras de mer à pied et d’aller visiter l’île d’à côté. L’exercice tient de l’inimaginable : faire une marche, à pied, avec de l’eau turquoise jusqu’à la taille pour aller découvrir une île demeure un concept plutôt difficile à cerner pour quiconque est né dans un nouveau développement de Chambly…
On y rencontre Cartagena qui est venu s’acheter un Coke à la pulperia en faisant le trajet en barque! On croise aussi les occupants de l’île, des garifunas purs et durs qui décorent leur maison avec des coquilles de conques vides. On fait le tour de l’île, littéralement, et on repart 8 minutes plus tard… C’est quand même deux fois plus grand que notre île!
De retour dans notre îlot, Alejandra nous a préparé un repas typique : des baleadas. 




Il s’agit de tortillas de maïs pliés en deux et les nôtres étaient garnies avec de la pâte de fève rouge et des œufs brouillés. 
 On s’installe à la table au milieu du quai, le toit de chaume nous fait une ombre sublime, et, de là, on admire, bouche bée, la carte postale qui défile sous nos yeux. L’endroit nous offre une vue imprenable et magnifique sur la mer, l’île, la maison et les poissons qui vivent sous le quai… Les adjectifs sont trop peu expressifs pour faire justice au moment!

  
Après s’être dardé dans cet excellent repas, l’appel de la sieste se fait rapidement sentir. On ne sait trop quoi blâmer entre l’excès de nourriture, le hamac trop bien placé, le lever du corps trop matinal ou simplement qu’on avait déjà faire le tour du proprio! Charles prend le hamac sur le quai et les enfants gagnent leurs lits dans notre cabine. Même le soleil collabore et laisse place à de gros nuages gris pour ajouter à l’ambiance et abaisser la température de quelques degrés. Heureusement, au réveil, on retrouve de l’énergie et un beau soleil radieux pour poursuivre nos activités.
 On se refait une séance d’apnée et les enfants profitent de la plage et de son gros sable granuleux, blanc à rendre jaloux. On s’attarde longuement et ça nous permet de réellement passer en mode insulaire et d’apprécier la beauté époustouflante qui nous entoure. Après avoir regardé le soleil plonger dans la mer, on se retrouve sur le quai pour apprécier la fin du jour et l’arrivée de la nuit étoilée. Quel endroit paradisiaque pour une petite séance de yoga familiale! Ce fut un autre moment magique que vous devrez imaginer parce que si le côté splendide de la chose peut être relaté, le sentiment d’être coupé de tout en est malheureusement un qui est intérieur et donc beaucoup plus difficile à décrire avec justesse.
 Nous avons souper d’un classique centre-américain, un rice and beans avec du poulet tellement bien apprêté que même la viande blanche nous a plu... Le quai fut encore une fois l’hôte de notre ripaille et, même dans le noir, le décor était des plus impressionnants. Personne ne s’est fait prier pour utiliser son lit, tous ont sombré dans la brise chaude bercés pas le bruit des vagues. Même les parents, après avoir compté les étoiles et déclaré qu’il y en avaient assez pour illuminer toute les journées de l’année, se sont fait emporter par la « Morphé des Antilles ». 

 Après une nuit fabuleuse au milieu de nulle part, le soleil levant nous invitait fortement à suivre son acsencion, pendant que le vent chaud qui entrait par les volets entrouverts caressait la fin de nos rêves. Ce dernier a nettement gagné la bataille; comment ne pas succomber à cette divine trêve! 



En ouvrant les volets ce matin...pas facile !
 
Marine et Alejandra
Au réveil, on s’est dirigé vers la maison principale, pour retrouver Alejandra qui s’affairait à nous préparer des pancakes. Installés au comptoir,  les enfants se chicanaient chaque crêpe qui arrivait, et elle prenait plaisir à les voir se régaler de ses concoctions. On prendrait définitivement une Alejandra tous les matins… Même son café était respectable, ce qui ne fut pas sans parfaire ce début de journée qui s’annonçait déjà bien.
Dans l’ordre des choses venait le déversement de crème solaire pour affronter l’omniprésence et l’intensité de Galarneau. Cette étape franchie, nous avons pu retourner voir nos amis les poissons et leurs voisins, les oursins. Une fois rafraîchit par la mer et avant de brûler sous le soleil, il était temps de passer au volet communautaire de notre aventure. Nous avions apporté des pots de bulles pour les enfants de l’île, mais comme il n’y a aucun enfant sur notre île, fraudra aller en trouver ailleurs! 

On est donc retourné dans l’île d’à côté pour offrir nos bulles aux enfants garifunas. Jules et Marie-Claude ont fait le trajet en apnée pendant que Charles, sherpa de Romane, faisait la traversé en marchant dans l’eau turquoise avec Marine et Colin. À notre grand désarroi, l’île était presque déserte. Hier, on sentait qu’il y avait de la vie, des enfants qui jouaient, des gens qui s’affairaient, mais là, on a dû chercher des enfants pour leur offrir nos cadeaux. Heureusement, une grosse barque est arrivée avec, à son bord, une douzaine de femmes de la communauté et une pléthore de gamin frisé. On a fini par être capable de faire des heureux et on est retourné chez nous.

 Pour notre dernier repas dans l’île, Alejandra nous a fait la total : crevettes rôties à l’ail, riz aux carottes, fèves rouges, banana verde et yuka. On tentait d’engloutir les portions gargantuesques que la cuisinière nous avait servies quand le bruit du moteur du bateau de Tony nous a ramenés à la réalité; notre rêve tirait à sa fin. On a rapaillé nos trois sacs, remercié nos hôtes et avons quitté rapidement parce que les adieux qui chuintent sont plus difficiles que les au revoir rapides.
On ne sait pas pourquoi, mais Tony a fait un arrêt dans l’île d’à côté. 







 
Cartagena qui fait danser les enfants !
 Contrairement à ce matin où tout était désert, on y a trouvé un monde fou et une ambiance de méga fête caribéenne. L’île accueillait des hordes de touristes. Le rouge incandescent de leur coup de soleil et leur bracelet tout aussi phosphorescent nous indique qu’ils venaient des hôtels tout inclus avoisinants, sur la côte. 

Pour l’occasion, les locaux vendaient des souvenirs, de la nourriture et avaient même sortis les tam-tams pour faire danser tout un chacun. 




 On en a profité pour prendre une petite bière histoire de digérer tout ce qu’on venait de manger et pour contempler, à distance, NOTRE île.
Le retour en bateau s’est fait en sieste pour certains, en blagues pour d’autres, mais les changements de couleur de l’eau était moins émerveillant qu’en sens inverse. Même si on a retrouvé la mer brune qu’on connaît, on a quand même pris une petite heure sur la plage pour atterrir et regarder, de loin, l’archipel qui envahit maintenant nos cœurs et nos pensées. 
Forcés de laisser cette inoubliable parenthèse de vie derrière nous, on est remontés tranquillement à la maison pour procéder au dessablage et au dessalage qui s’imposait. Une fois propre, on s’est rendu compte que le soleil ne nous avait pas épargnés. Pas de coup de soleil, sauf Marie-Claude qui avait oublié de se crémer la cuisse gauche (!!!), mais un sentiment de lourdeur et un besoin d’eau criant. Toujours bourrés de notre dîner on s’est contenté d’une petite soupe au légume avant de retrouver la douceur de nos oreillers.
Cayos fut une expérience hors du commun que le récit factuel ne peut malheureusement rendre avec justesse. Quelque part entre Gilligan et Robinson Crusoé, nous nous sommes retrouvés isolés dans un espace d’une beauté à la fois émouvante et inouïe où la simplicité est propre à l’introspection et à l’appréciation de notre propre richesse et de celle qui nous entoure. Ces 24 heures ont été un moment fort qui restera gravé en nous et qui, au moment d’écrire ces lignes, une semaine plus tard, habite encore nos pensées…

dimanche 26 février 2012


Jour 33 (lundi 20 février) 

Notre petit avant-midi d’école s’est déroulé sans histoire et on s’est retrouvés après le dîner avec des fourmis dans les jambes. On est donc partis à pied du côté de Sambo Creek pour essayer d’en découvrir une partie jusqu’ici inexplorée. MINS nous avait bien mis en garde au début de notre séjour de ne pas quitter l’asphalte « because it’s not safe to do so… », mais comme on a, depuis, établi qu’il est alarmiste en cette matière, on s’aventure sans gêne hors du béton de la cité garifuna.  On y découvre le Westmount de Sambo Creek! Des petites maisons, dont certaines jolies et bien tenues, beaucoup de champs et de vaches et le terrain de soccer. Ce n’est pas à cause du danger qu’il ne faut pas s’y promener, c’est parce qu’il n’y a rien à y voir!
 Au bout du village, on marche sur la plage pour rentrer chez nous. Le soleil y est chaud et les enfants courent dans la mer en ventilant leur trop-plein d’énergie. On aboutit dans le sable entre le Diving Pelican et chez Dante’, juste à temps pour voir Tony arriver de Cayos Cochinos. Charles, avec plusieurs autres personnes, lui donne un coup de main pour remonter son bateau sur la plage et une fois le bateau remis à sa place, Tony nous offre de partir pour l’archipel, demain matin. On lui avait demandé de nous y amener pour y passer une nuit quand il aurait de la place et nous savions que ce serait ces jours-ci, mais on espérait un peu plus que 12 heures de préavis. Comme il nous faut y amener notre nourriture et que ce n’est pas prévu, MINS nous offre de faire une virée, ce soir, à La Ceiba pour y faire les achats requis. Lui et Charles ont quitté sur-le-champ pour arriver avant la fermeture de l’épicerie et quérir le nécessaire à survivre quelques jours sur une île déserte.

Au retour à la maison, on prépare le reste des effets familiaux sans trop savoir ce qui nous attend. On sait qu’on sera sur une île, au milieu de la mer des Caraïbes, et que nos hôtes cuisineront pour nous, mais ça s’arrête là! Eau? Électricité? Toilettes? Lits? Couvertures? On verra bien. On ne sait même pas sur laquelle des îles de l’archipel nous aboutirons. Ce qui nous frappera encore plus que ces questions est l’heure de notre lever. MINS quitte à 5h45 pour préparer son bateau et nous voulons profiter de son auto pour y mettre la glacière avec les denrées périssables ainsi que nos deux sacs d’effets personnels pour ne pas avoir à les descendre nous-mêmes à la plage demain matin. On se couche donc un peu fébrile, mais trop tard, devant l’idée de cette nouvelle aventure…

samedi 25 février 2012

Entre papillons et serpents

Jour 32 (dimanche 19 février)

Forts d’avoir en notre possession une voiture et déterminés à en rentabiliser la location, nous décidons de compléter notre week-end Parque National par une visite au lodge de Pico Bonito. Le Lodge est en fait un Eco-hôtel chic et reconnu dans la région. Dans nos recherches pour percer le mystère du parc, nous les avions appelé mais ils offraient, évidemment, une solution chic, sans tracas et à fort prix. Cependant, le Lodge compte dans ses attraits une ferme de papillons et un serpentorium qui, de prime abord, sont dignes d’une visite. Le lodge est situé de l’autre côté de La Ceiba et nous nous y dirigeons dans un approximation qui n’a d’égal que la connaissance de celle-ci…

Chemin faisant, on percute un autre trou qui orne la chaussée et malgré les jurons du chauffeur, on poursuit notre route comme si de rien n’était. Nous savons que la route qui mène au Lodge est située aux alentours du village de El Pino mais comme il est souvent difficile d’identifier avec certitude les villages que nous traversons, nous passons tout droit à celui-ci, non sans en remarquer un restaurant de bord de route duquel s’échappent des effluves de feu de bois et viandes grillées. En demandant notre route à un bien attentionné camioneur, il nous renvoie tout près de La Ceiba. Dubitatifs mais coopérants et voulant laisser toute sa crédibilité à ce gentil quidam, on rebrousse chemin.
En recroisant le restaurant-qui-sent-bon, on y fait la pause du dîner. Grand espace ouvert aux quatre vents, on y mange, affalés sur un divan accueillant, des grillades de poulet et de bœuf marinés avec des tortillas maison qui, à eux seuls, valent l’arrêt. Faute de bière, on y boit des jus de fruits tout à fait honduriens, c'est-à-dire bien trop sucrés…
Au moment de repartir, on constate que le cahot rencontré plus tôt nous a laissé plus que des injures : la roue avant gauche de la voiture affiche une jolie crevaison! Il nous faut donc arrêter dans un garage de bord de route qui, ici, sont légion.
 Un petit toit en tôle qui abrite un énorme compresseur à air avec deux jeunes hommes (ils ont l’air d’avoir 12 et 16 ans) qui triment dur sur des pneus et des jantes. Le plus jeune des deux enlève la roue défectueuse, frappe la jante avec beaucoup d’amour, et accessoirement avec un marteau rudimentaire, puis regonfle le pneu et repose la roue seulement pour réaliser que le tout fuit encore.
Il recommence donc, mais cette fois il fausse le filet d’une des tiges fileté et la bousille définitivement : Bravo buddy! Un peu piteux, il nous explique que la roue fuit encore et nous exhorte à poser le pneu de secours. En sortant le pneu accidenté de la veille, les épaules lui tombent et son regard en dit long sur ce qu’il pense des aptitudes de chauffeur de son interlocuteur : le momentum vient de changer! 
Il recommence son manège sur la deuxième roue et au moment de frapper la jante, l’autre mécanicien de fortune l’interrompt et fait le travail à sa place. Ses coups semblent mieux placés et on sent une certaine assurance dans son geste, ce qui faisait cruellement défaut au premier luron. Au test de l’air, la réparation tient le coup et, sans éclater de rire, quand ils nous ont demandé 40 lempiras (2 $), notre frustration est disparue. Nous avons repris la route sur quatre pneus, mais toujours sans roue de secours, bien décidés à faire mentir le dicton du jamais deux sans trois.

Fatigués de chercher, on arrête à la porte d’une base militaire pour demander, à nouveau, des directions. Marie-Claude a mobilisé, à elle seule, la quasi-totalité des effectifs de l’armée déployés dans ce poste. De l’auto, après deux minutes, on ne la voyait plus, tellement il y avait des gars en treillis militaire autour de sa jupe… Si on est capable de comprendre l’attirance naturelle de ces soldats, on comprend moins bien pourquoi aucun d’eux ne connaissait l’endroit que nous recherchions; ils sont peut-être forts en tactiques, mais pour l’orientation, on repassera...

Coup de téléphone au lodge pour se faire expliquer la route à suivre : « Passé le Rio Coloradito (qui s’est avéré être le Rio Corintho, on mettra la faute sur le cellulaire), entre les deuxièmes et troisièmes boyas, se trouve, sur la gauche, un lampadaire peinturé en jaune à côté d’une pulperia : c’est là! » «Et le nom de la pulperia senior? » «No save ». Bien oui, rien que ça! Un lodge de supposée renommée mondiale sans enseigne… c’est beau l’éco-tourisme mais c’est pas facile à trouver!
Nouveau changement de direction et nouveau retour sur nos pas! Entre les deuxièmes et troisièmes boyas (sorte de speed bump locaux) il y avait effectivement un poteau peinturé en jaune qui se trouve tout juste à côté d’une puperia (« Alexandra, senior, es su nombre! ») mais surtout devant un restaurant ouvert aux quatre vents, avec un grand divan et duquel s’échappe des effluves de viandes grillées… Ah! Que c’est beau la découverte…

Une route en grosses pierres nous a menée, sur quelques kilomètres, à l’endroit que nous cherchions depuis maintenant trop longtemps. Une chance que la crevaison était réparée! Nous sommes arrivés à 13h40 en ce beau dimanche et l’affiche accrochée à la clôture cadenassée indiquait clairement la fermeture du site à 13h30 le dimanche… Comme le ridicule ne tue pas, on a éclaté de rire! Bien oui, c’est sûr! Qu’importe, on sort quand même de l’auto pour au moins pouvoir dire qu’on a touché à la clôture de la place. Après quelques minutes d’errance et de prise de conscience de la risibilité de la situation dans laquelle nous étions, un garde arrive pour nous expliquer ce que nous avons déjà constaté. Forte de son expérience militaire, Marie-Claude se lance en supplications mielleuses et réussit à convaincre le garde d’essayer de nous avoir une visite. Quelques minutes plus tard, on gentil guide moustachu vient nous ouvrir la barrière et c’est en chantonnant familialement le « tu étais vraiment beau, avec ta moustaaa-aaache… » des Trois Accords que nous marchons dans la jungle.
La visite de la volière de papillons ne valait pas le prix d’entrée (même pas vu de Morpho) et bien que le serpentorium était bien peuplé (une quinzaine de serpents), ces animaux restent peu attirants, pour rester polis. Ça se place bien dans une conversation qu’on a vu un Terciopelo (fer-de-lance), un Boa constrictor et des serpents à sonnettes, mais dans le fond, on étaient surtout contents de voir les cadenas sur les cages… Notre guide, qui parlait anglais, était bien intentionné, mais la description de cette visite fait moins de sept lignes et ça démontre toute la l’attention qu’elle a suscitée en nous.
En retournant, pour une énième fois, vers La Ceiba, on passe faire quelques courses dans une grande épicerie et on se pointe, comme de parfaits innocents, chez notre locateur de voitures. On y est reçu tout sourire, cette fois c’est Romane et Colin qui usent de leurs charmes, et personne ne remarque que nous ramenons la voiture pas mal plus endommagée qu’il y a 48 heures. Ces gens ont même la gentillesse de nous reconduire chez nous; on se sent presque mal… et on espère secrètement qu’ils vont frappé le même trou qu’on a rencontré la veille!
Entre deux séances de piscine, on a fait dégeler un Robela, brochet de mer, entier qui nous restait du marché. Sa cuisson en papillote et le festin que nous nous en sommes fait a jeté un petit baume sur notre journée somme toute un peu moyenne : visite ordinaire, route un brin stressante, mais le tout parsemé d’anecdotes très drôles et combien de lempiras sauvés en réparation de la «coche»! On a conclu le tout en regardant les étoiles dans le hamac sur notre balcon : certaines journées moyennes finissent mieux que d’autres…

Pico Bonito (Parque National)

Jour 31 (samedi 18 février)

Notre journée de grande excursion a commencé par un peu de préparation ou de réparation, selon nos aptitudes… Hier, en rentrant de la Ceiba en auto, on a roulé dans un des immenses cratères qui parsèment les routes asphaltées. Résultat net : jante du pneu avant gauche déformée qui a entraîné une crevaison. Dans le confort de notre entrée bétonnée, Charles a procédé à la pose du pneu de secours, pleine grandeur s.v.p., pendant que Marie-Claude concoctait une salade de pâtes en prévision des estomacs affamés en milieu de randonnée. Une fois ces formalités réglées, on a pu s’entasser dans notre tape-cul format miniature et avons filés vers le Parque National Pico Bonito.
La jeune dame à l’accueil nous a demandé trois fois si nous comprenions bien que nous nous apprêtions à entreprendre une randonnée de trois heures dans la jungle sur des sentiers escarpés. Elle nous a mentionné, au passage, qu’il y avait une exposition de papillons et d’insectes  au 2e étage, peut-être dans l’espoir de nous sustenter! Quand on lui a eu démontré qu’on était assez inconscients pour comprendre ET décider de s’aventurer quand même dans le sentier, elle nous a réclamé 440 lempiras (22$, versus les 156$ que demandaient les organisateurs de tours) et nous a ouvert une barrière menant sur un immense pont suspendu fait de fils de fer et de plaques de métal. Pensez à Indiana Jones qui enjambe le Rio Cangrejal!

La vue du pont est splendide, à couper le souffle! Des roches immenses jonchent le lit de la rivière et l’eau, d’un vert clair et limpide cascade en bouillons de différentes grosseurs. Le soleil et les oiseaux viennent ajouter à la photo parfaite…
Une fois de l’autre côté, deux sentiers s’offrent à nous pour accéder à une dernière portion qui, elle, aboutit à une chute à flanc de montagne. Conformément aux indications de la garde parc, on prend le sentier La Roca, à gauche, pour revenir par celui de droite, El Mapache. Le sentier est étroit et sinueux. Roches, racines et autres réalité de la jungle constituent autant des entraves que des sujets de découvertes et d’émerveillement à chacun de nos pas.
 La température est chaude et humide, mais l’ombre du haut couvert forestier nous garde dans une ombre agréable. La cadence est imposée par les enfants qui s’échangent la tête de notre file indienne et on garde, lorsqu’on peut, la tête haute pour essayer d’apercevoir des animaux. Cela nous permet plutôt d’admirer la magnifique végétation qui nous entoure. Aux différentes essences d’arbres se juxtaposent une ou deux couches de plantes grimpantes qui agissent comme décoration de ces arbres géants. Nous sommes surtout impressionnés par les racines d’une espèce d’arbre qui jaillissent du sol, à la verticale, et viennent formée d’immenses remparts. L’omniprésence des lianes fascine nos yeux autant que nos esprits. On a tous un petit Moogli en nous!

Deux heures, parsemées de quelques pauses et de plusieurs changements de premier de cordée, nous amènent à la croisée du sentier que nous n’avons pas emprunté. Tout regaillardis, nous nous engageons dans la dernière portion qui nous mènera à la chute. Elle est nettement plus difficile et escarpée que celle que nous venons de quitter et la fatigue ainsi que la faim commencent à nous gagner. Du haut de ses trois ans et demi,  Romane a totalement assuré pendant la première partie, mais les grosses roches qui forment des marches d’escalier géantes requièrent des pas et des sauts que ses petites jambes dodues ne lui permettent plus de faire. Charles joue donc le rôle de Sherpa pour la Biloutte!

De l’autre côté d’un virage, tout en haut d’une montée, on aperçoit enfin la «cascada » tant convoitée. Le bruit de l’eau qui tombe est fort et les roches du sentier sont humidifiées par la bruine rafraîchissante qui émane de la chute. Une dernière descente en deux portions très abruptes ( le mot est faible…) nous amène à destination. Un groupe de cinq personnes qui apprécient le spectacle, nous mettent en garde contre les roches très glissantes dues au lichen imbibé d’eau. En tentant de s’installer pour dîner, Marie-Claude pousse un cri dont l’authenticité fait d’abord craindre le pire, mais qui, après examen, ne révèle que son enthousiasme pour un papillon morpho bleu qui passe par là. Wow! C’est presque irréel!

On réussit à tous s’asseoir pour dîner et on regarde le spectacle de la chute qui déverse son eau sur des plantes agrippées aux roches et sur lesquelles on admire de jolies fleurs rouges. Différents papillons vont et viennent pendant notre arrêt et même le morpho se paie un lunch dans des débris d’ananas laissés sur une roche non loin de nous. Sa valse gracieuse est digne d’un film. Inutile de le prendre en photo, car son spectacle n’aura d’authenticité que dans notre mémoire.  Le bruit, la bruine, la fatigue et l’heure avancée finissent par mettre un terme à notre délectation de ce moment féérique; on a mis au moins 2 heures 30 à venir et il faudra en compter entre une et deux pour rentrer.
La première partie du retour est aussi exigeante qu’elle l’était en sens inverse. Romane est définitivement installée sur les épaules de son père et on reprend tranquillement le rythme que nous avions à l’aller. Puis, à la croisée, on prend le sentier inconnu en espérant secrètement qu’il sera moins difficile. Il s’avère tout aussi escarpé que l’autre, mais comporte moins de roches, mais plus d’escaliers entre des grandes racines d’arbres. On peut donc reprendre notre formation du départ et notre rythme. L’amollissement des troupes se reflète par le silence qui s’installe peu à peu et nous oblige à une vigilance de tous les instants devant les différents obstacles que nous rencontrons. Deux petites dégringolades, sans conséquences, nous rappellent l’importance de respecter les principes de base pour la marche en descente. Près de deux heures plus tard, on retrouve le pont suspendu. Avant de le repasser, on fait une pause collation bien méritée en profitant des rayons du soleil dans une clairière. La lumière du soleil qui descend rend l’eau encore plus verte et limpide que ce matin. Quel spectacle merveilleux pour clore une si belle randonnée!
Les fourmis travaillent fort ici !

En redescendant vers La Ceiba, on fait un saut au marché pour essayer de se trouver un poisson frais, mais comme il est 17h,  les stands de poisson sont tous fermés et on se rabat sur des côtelettes du marché intérieur. On se rend compte alors qu’avec une auto, on retrouve presque instinctivement les réflexes d’approvisionnement que nous avons à la maison, soit d’acheter frais, selon nos goûts de fin de journée.
Sur le chemin du retour, on a porté toute notre attention sur les cahots de la route pour ne pas faire une seconde crevaison en autant de jours pendant que les plus fatigués faisaient une petite sieste pour effacer la fatigue de la randonnée et pour survivre au reste de la journée. On a rincé notre moiteur dans la merveilleuse piscine chaude et avons clos la journée en félicitant nos quatre têtes blondes qui ont randonnées, pendant près de quatre heures, comme des vrais champions!